MAURICE – Discours de Nicolas Ritter (Directeur de PILS)

MAURICE – Discours de Nicolas Ritter (Directeur de PILS) lors du lancement du 12e Colloque VIH/sida Océan Indien

| Cérémonie d’ouverture du 12e Colloque VIH Océan Indien – Hôtel Intercontinental – Balaclava – Ile Maurice – 12 au 15 Novembre 2013 – Discours de Nicolas RITTER – Président de RAVANE+, Directeur de PILS et Personne Vivant avec le VIH |

Monsieur le Ministre, Chers Délégués, Chers Amis,

Nous y sommes ! Pour la troisième fois, l’île Maurice accueille le Colloque VIH/sida Océan Indien, moment de rencontres, de partage, de formation, d’information, de réflexion, de plaidoyer et de propositions d’actions pour une réponse régionale renforcée. Un Colloque qui a failli ne pas voir le jour tant les ressources régionales font défaut. Alors permettez moi en premier lieu de saluer nos délégués régionaux et internationaux, nos éminents professeurs et les organismes qui ont permis leurs venues, car sans leurs présences, il n’y aurait pas de Colloque Régional.

Je souhaite également saluer les équipes du Ministère de la Santé et du comité d’organisation qui dans un délai aussi court ont réussi la prouesse de nous rassembler dans ce magnifique hôtel pour nos travaux. Un merci tour particulier a Monsieur Gaoneadree et à son équipe qui ont travaillé d’arrache-pied avec le plus grand des professionnalismes.

Monsieur le Ministre, chers Amis, avec des traitements qui se révèlent désormais plus efficaces que les préservatifs dans la prévention de la transmission du VIH, des gels microbicides prometteurs, des nouvelles molécules révolutionnaires pour guérir de l’hépatite C, pour ne citer que ces quelques exemples, la médecine reprend aujourd’hui ses droits.

Pour autant, trente années de lutte contre le sida ont également démontré que cette médecine n’est vraiment efficace que si elle est couplée à des stratégies de prévention et de soins en lien avec les droits humains et surtout avec la participation effective des personnes concernées.

Une approche communautaire qui doit se consolider et qui, pour ce faire, nécessite que ces personnes concernées soient elles-mêmes renforcées, fasse preuve de bonne gouvernance et participent pleinement à tous les échelons de la riposte. C’est là notre meilleure arme pour aller vers notre objectif commun : zéro mort, zéro contamination et surtout zéro stigmatisation.

Compte tenu de la complexité de ce que nous devons accomplir, nous n’aurons pas de résultats sans engagement politique au plus haut niveau. Le projet de coopération régionale porté par la Commission de l’Océan Indien est un bon exemple et la fin de celui-ci, sans continuité annoncée, met en péril nos efforts et la réponse au VIH dans la zone.

C’est notamment pour cette raison qu’hier, nous, personnes concernées, infectées et affectées par le VIH, associatifs, avons tenu un atelier de réflexion sur le devenir du réseautage associatif régional. Atelier rendu possible grâce au soutien du Ministère de la Santé et de la Qualité de la Vie que je remercie une fois de plus. De cet atelier est sorti une déclaration politique (non partisane) que je vais partager avec vous :

|| Déclaration de Balaclava ||

Nous, les associations de lutte contre le VIH, les personnes vivant avec le VIH, les personnes engagées de la société civile de l’Océan Indien :

1. Considérant qu’en 2013 une personne dépistée, ayant accès aux traitements et obtenant ainsi de bons résultats immuno-virologiques, a un pronostic vital identique à une personne non infectée

2. Considérant que la taille de l’épidémie dans notre zone permet une prise en charge correcte pour toutes les personnes infectées

3. Considérant que, malgré les nombreux progrès accomplis dans la zone (montée en charge des médecins référents, accès au matériel de titrage des CD4, création de nombreuses associations), il persiste toujours des ruptures de traitements antirétroviraux, des difficultés pour traiter les infections opportunistes ou pour avoir accès à un titrage de CD4 ou a une charge virale, entrainant de nombreux drames humains, des souffrances multiples, et trop souvent encore la mort de nos semblables

4. Considérant que de nombreuses nouvelles infections pourraient être évitées si les gouvernements des pays de la sous-région rendaient possibles les services adaptés aux populations vulnérables aux risques de l’infection à VIH (consommateurs de drogues injectables, travailleurs(ses) du sexe, hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes, personnes détenues, etc.)

5. Considérant qu’il subsiste une forte discrimination envers les personnes vivant avec le VIH et les populations vulnérables

6. Considérant qu’il subsiste d’importantes inégalités en termes d’accès aux soins et de prise en charge globale

7. Considérant que de nombreux médecins référents ne sont pas aux postes pour lesquels ils ont été formés et que cela entraîne une carence importante en ressources médicales

8. Considérant qu’il subsiste de nombreux manques en termes de financements de la société civile

9. Considérant qu’il existe encore des lois discriminatoires et inadaptées à une riposte de qualité.

10. Considérant qu’il existe actuellement deux réseaux régionaux (RAVANE+ et Femmes Océan Indien Positives), ce qui dilue les ressources disponibles

Nous déclarons :

1. Renouveler notre engagement dans la lutte contre le VIH/sida

2. Renouveler notre engagement dans la lutte contre toute forme de discrimination, pour l’égalité des droits humains et celle des genres

3. Décider d’unir nos forces et de parler d’une seule voix afin de continuer à défendre nos visions, missions et objectifs

4. Exprimer notre volonté de nous regrouper en un seul réseau régional des personnes infectées et/ou affectées et/ou engagées dans la réponse au VIH, RAVANE+, s’organisant autour notamment des thématiques suivantes :

a) Les personnes vivant avec le VIH

b) Les femmes infectées et affectées (avec l’approche Femmes Océan Indien Positives)

c) Les enfants infectés et les orphelins du sida

d) Les hommes ayant des rapports sexuels avec les hommes et les personnes transexuelles et transgenres

e) Les jeunes

f) Les personnes vulnérables (consommateurs de drogues injectables, travailleur(se)s du sexe, personnes incarcérées,etc.)

5. Inclure la problématique des hépatites, y compris les mono-infections, dans notre action

6. Adhérer au principe « Tous concernés, Tous égaux »

7. Exprimer notre volonté de mettre en place une veille informationnelle sur les difficultés rencontrées et un système d’alerte régional

8. Exprimer notre volonté de porter la parole des organisations nationales de la société civile

Nous recommandons aux instances présentes lors du 12e colloque VIH/sida de l’Océan Indien et aux instances gouvernementales de l’Océan Indien :

1. La mise en place dès 2014 de la suite du programme AIRIS (http://security.ioconline.org/fr/airis.html)

2. La mise en place du fonds d’urgence thérapeutique au sein de l’Océan Indien

3. L’éradication des ruptures du continuum de soins (traitements ARV, réactifs, etc.)

4. Une meilleure collaboration entre les gouvernements de l’Océan Indien

5. La mise en place de nouveaux programmes efficaces de lutte contre les stigmatisations et les discriminations

6. Une mobilisation de ressources pour l’action régionale

7. L’inclusion de la société civile dans toutes les instances décisionnelles

8. La mise en place d’un système de suivi/évaluation des recommandations et des conventions issues des Colloques VIH/sida de l’Océan Indien

Nous soussignées, associations de lutte contre le VIH, personnes vivant avec le VIH, personnes engagées de la société civile de l’Océan Indien, adhérons à cette déclaration pour sauver des vies et prévenir de nouvelles infections.

——————

Que le son de la Ravane résonne pour nous rappeler que c’est tous unis que nous devons travailler, afin que cette danse de la vie et de la mort nous fasse grandir, nous rende meilleurs.

Bon Colloque à Tous !

Merci

Le site internet officiel du 12e colloque VIH/sida Océan Indien :

http://www.gov.mu/portal/sites/VIH/accueil.html

Photo : Nicolas Ritter – Président de RAVANE+ – Directeur de PILS (membre mauricien de Coalition PLUS) – Personne Vivant avec le VIH

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