Sérophobie : les touristes séropositifs indésirables dans 40 pays rappelle AIDES

Source : Christine Mateus – Leparisien.fr – 25 août 2014

Santé. Les associations de lutte contre le sida s’insurgent contre les restrictions d’accès dans de nombreux pays, dont l’Australie, la Russie, Singapour ou le Qatar.

La personne séropositive est-elle un touriste comme les autres ? Alors que l’été est justement la période des voyages, la question se pose. Pour quarante pays dans le monde*, la réponse est non. Trente ans après la découverte du virus du sida, des restrictions à la libre circulation, imposées par les gouvernements dans les années 1980 alors que sa transmission était mal connue, sont toujours appliquées dans plusieurs régions du globe.

Certaines limitent la présence des personnes séropositives aux courts séjours, d’autres la restreignent fortement, voire interdisent strictement l’entrée sur le territoire, exigeant un test de séronégativité avant de mettre un pied dans le pays. Et si la séropositivité est découverte avec la présence d’antiviraux trouvés dans une valise, c’est l’expulsion.

Contraints de cacher ses médicaments pour voyager

Exemple : tout demandeur de visa de plus de trois mois, à destination de la Russie, est dans l’obligation d’effectuer et de présenter aux services consulaires russes un test sérologique. Et ce n’est que fin 2009 que les Etats-Unis ont levé ces restrictions au séjour ; en 2010, ce fut au tour de la Chine. Il y a six ans, 75 pays restreignaient l’entrée des séropositifs sur leur territoire.

« Ça bouge doucement, mais il reste beaucoup travail à faire, reconnaît Alain Legrand, directeur général de l’association Aides. Les séropositifs sont clairement discriminés et, en filigrane, pour certains pays, les homosexuels à qui on associe le virus. » Les territoires concernés mettent en avant des exigences de santé publique pour justifier ces restrictions. « Un non-sens, s’énerve le responsable. Du coup, certains séropositifs font le choix d’arrêter provisoirement leur traitement. C’est là qu’ils deviennent potentiellement contaminants. »

Ce fut en effet la décision de Nicolas. C’était en 2006, il se rendait alors en Mongolie qui appliquait ces consignes. « Le voyage a duré quatre mois. En rentrant en France, ma charge virale avait augmenté et mon système immunitaire s’était affaibli. Du coup, maintenant je mens. Lors d’un voyage au Canada (NDLR : alors concerné par les restrictions) j’ai dit que j’avais des soucis cardiaques lorsque l’on m’a interrogé sur mes médicaments. »

Fred, militant d’Aides, a plus d’une fois changé le conditionnement de son traitement dans des flacons de vitamines, notamment pour des séjours au Viêt Nam et aux Etats-Unis, deux pays anciennement restrictifs. « Si je veux rester plus de trois mois en Australie, aujourd’hui c’est impossible. Toutefois, pas besoin d’aller très loin pour connaître cette discrimination. Il y a six mois, gare Montparnasse lors d’un contrôle douanier, on m’a demandé de déballer mon traitement devant tout le wagon. C’était déjà une atteinte à la confidentialité de mon statut sérologique. »

Au Qatar, tous les étrangers prévoyant d’y voyager ou d’y résider pendant plus d’un mois doivent aussi se soumettre à un examen médical et à un dépistage du VIH dans le pays. Si le test est positif, c’est l’expulsion qui vous attend.

* Dont l’Australie, l’Egypte, Israël, la Jordanie, la Malaisie, la Nouvelle-Zélande, le Qatar, la Fédération de Russie, l’Arabie saoudite, Singapour, Taïwan, les Emirats arabes unis.

Illustration : © Leparisien.fr

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