Lundi 1er août 2022, dans le cadre de la Conférence Internationale sur le Sida, AIDS 2022, nos activistes ont pu visionner le documentaire “C’est en voir des milliers”, en hommage au regretté Yves Yomb. Cet activiste a lutté au cours de sa vie pour les droits humains, pour les minorités sexuelles et pour les personnes vivant avec le VIH. La projection du film a été suivie par une prise de parole d’activistes, dont celle de Serge Douomong Yotta, Directeur du plaidoyer de Coalition PLUS, qui rend hommage à tous nos compagnons décédées dans son discours.
Yves Yomb, activiste ayant lutté pour les droits humains, les minorités sexuelles et les personnes vivant avec le VIH.
Yves Yomb, décédé à l’âge de 45 ans. Joël Nana, décédé à l’âge de 33 ans. Cyriaque Ako, décédé à l’âge de 54 ans. David Kato, décédé à l’âge de 47 ans. Eric Lebembe, décédé à l’âge de 33 ans. Jérémie, décédé à l’âge de 26 ans. Desmond, décédé à l’âge de 28 ans. Pascal, décédé à l’âge de 26 ans. Lambert, décédé à l’âge de 44 ans. Michel, décédé à l’âge de 32 ans. Dimitri, décédé à l’âge de 27 ans. Yannick, décédé à l’âge de 24 ans. Nos âmes sont brûlantes. Tant de compagnons sont partis. Nos collègues, nos amis, nos frères et sœurs, nos amours. Dans le feu de l’action, des milliers d’entre eux ont tout donné. Sans réserve, sans profit. Ils ont sacrifié leurs corps, ils ont donné leurs âmes. Aujourd’hui, je les entends crier. Non, ils ne crient pas. Ils nous confortent. Quel est le but de leur sacrifice ? Est-ce que nous chérissons leur héritage ? Je suis rongé par la douleur. Ils appellent encore depuis le paradis rose où ils sont censés reposer. Leurs têtes tachetées d’étoiles sont inclinées en signe de désespoir. Quel sens donnons-nous à leur héritage ? Sommes-nous à l’écoute de leurs paroles ? Ressentons-nous leur colère ? Y a-t-il quelque chose de plus triste que les larmes des morts ? Aujourd’hui, nous sommes toujours persécutés, haïs, crachés par le système. Après 40 ans de lutte contre le VIH, le sida continue de nous tuer. Quelle est l’issue pour nous, minorités sexuelles et de genre, personnes vivant avec le VIH ? Nous vivons mais nous sommes déjà morts. Nos jours sont comptés. Notre santé mentale n’est pas considérée comme une priorité. Notre lutte pour exister est considérée comme de la propagande pour un agenda LGBTI qui détruirait le monde. Cela n’a aucun sens. Les coups, les insultes, les blessures que nous subissons chaque jour aux quatre coins du monde tourmentent ceux qui en ont déjà payé le prix de leur vie. Pourtant, malgré leur chagrin, depuis le paradis rose, ces belles âmes m’envoient un Soleil. Vous le voyez ? Il est là, dans ma main. Un soleil qui s’appelle le courage. Je le dépose sur l’autel de cette Montréal inhospitalière. Il se lève à Concordia et il se couchera dans nos cœurs ouverts, de Dakar à Yaoundé, de Quito à Abidjan, de Lomé à Phnom Penh. Militants ! Levez-vous ! Luttons pour nos droits, luttons pour ce que nous devons préserver avant tout : notre bien-être psychologique et physique, selon chacun de nos contextes et de nos valeurs. À nos amis et partenaires de lutte, que le feu qui nous anime vous réchauffe. Il y a encore tant à faire. Nous voulons des solutions adaptées à nos réalités, à nos expériences, à nos origines. Nous voulons des ressources pour mettre en œuvre, des programmes qui donnent la priorité à notre santé mentale et à notre sécurité physique. Nous voulons des programmes financés pour transformer les engagements politiques en actions transformatrices. AGCS PLUS organisera une pré-conférence lors de la prochaine conférence francophone sur le VIH en 2024. Elle portera exclusivement sur la santé mentale des minorités sexuelles et de genre en Afrique. Ce sera un espace sûr de dialogue entre les communautés et les experts en santé mentale pour aborder notre présent et notre avenir. Nous voulons vivre. Nous voulons simplement vivre !
Serge Douomong Yotta, Directeur du plaidoyer de Coalition PLUS