Aujourd’hui, à 64 ans, Andrew célèbre son 30ème anniversaire de vie avec le VIH. Engagé comme volontaire dans une association en Malaisie, il est également membre exécutif de l’association partenaire de Coalition PLUS en Malaisie. Andrew n’hésite pas à partager son histoire, reconnaissant l’importance de ceux qui ont osé parler avant lui.
Andrew Tan au cours de la cérémonie d’ouverture de la Semaine Internationale du Dépistage en Malaisie
Coalition PLUS : Qui étiez-vous, il y a 30 ans, avant de découvrir votre séropositivité ?
Andrew T. : Avant ce diagnostic, j’étais un jeune cadre de 34 ans. Je travaillais dans le domaine du marketing et de la publicité et je prenais énormément de plaisir dans mon travail. J’aimais répondre aux défis qui se présentaient et promouvoir les marques et les produits des clients. J’avais un avenir prometteur. J’étais dans une relation stable depuis 8 ans avec mon partenaire. En résumé, la vie était belle et je me sentais invincible.
CP : Comment avez-vous découvert votre séropositivité ?
Andrew T. : Un an avant de la découvrir, mon père est décédé. En tant qu’aîné, j'ai assumé de nombreuses responsabilités familiales, mais j'ai vite réalisé que mon père était le lien qui nous unissait. Les tensions ont augmenté, chacun se reprochant sa mort, et notre famille s'est désintégrée. Un an plus tard, j'ai abandonné l'idée de préserver cette unité, ce qui a gravement affecté ma santé. J'ai commencé à souffrir de fièvre constante, de sueurs nocturnes et j'ai perdu du poids. Pour moi, il n’y avait pas de raison de s’inquiéter. C’est ma mère qui a insisté pour que je me rende à l’hôpital. Lorsque j’ai été hospitalisé, le VIH n’avait même pas été envisagé par mon médecin. Il a d’abord suspecté une fièvre typhoïde, puis une infection virale. Mais, cette réponse ne me satisfaisait pas. J’ai donc demandé au médecin quelles maladies il n’avait pas encore testées et m’a répondu : le VIH. Alors, je lui ai demandé de me tester. Il a pris mon sang, sans aucun conseil préalable. Le lendemain, il est revenu et il m’a annoncé : « Votre test est positif pour le VIH. Vous pouvez maintenant sortir ». Le médecin était complètement impuissant face à ce diagnostic. Il n’y a eu ni référence, ni conseil, ni information. J’étais laissé pour compte. J’ai compris qu’il n’y avait rien à faire pour moi et que je devais simplement attendre la mort.
CP : Comment ce diagnostic a-t-il affecté votre vie, vos perspectives d’avenir et vos relations familiales et amicales?
Andrew T. : Au début, j’étais très inquiet de transmettre le virus à mes proches et manquais d’informations correctes. Je me suis isolé, perdant confiance en moi et développant une mauvaise image de moi-même. Je prétendais travailler tard pour éviter les repas en famille. Je m’auto-discriminais d’une certaine manière. Heureusement, lorsque j’en ai parlé à mes proches j’ai reçu le soutien escompté. Mon partenaire, avec qui je suis depuis 38 ans, m’a toujours soutenu. Ma mère me montrait son soutien en cuisinant mes plats préférés, et mon frère et ma belle-sœur amenaient ma nièce chaque week-end. Cela m’a donné de l’espoir et l’envie de la voir grandir et réussir dans la vie. Un an après le diagnostic, j’étais toujours en vie. Ceci m’a donné le courage de me confier à un bon ami qui faisait du bénévolat pour une ONG. Il m’a dirigé vers un centre de traitement que je fréquente toujours actuellement. Ce sont ces professionnels de santé qui m’ont sauvé la vie. C’est grâce à eux que j’ai commencé à prendre mon premier traitement, une monothérapie : l’AZT. Lorsque j’ai été hospitalisé, le VIH n’avait même pas été envisagé par mon médecin. Il a d’abord suspecté une fièvre typhoïde, puis une infection virale. Mais, cette réponse ne me satisfaisait pas. J’ai donc demandé au médecin quelles maladies il n’avait pas encore testées et m’a répondu : le VIH. Alors, je lui ai demandé de me tester. Il a pris mon sang, sans aucun conseil préalable. Le lendemain, il est revenu et il m’a annoncé : « Votre test est positif pour le VIH. Vous pouvez maintenant sortir ». Le médecin était complètement impuissant face à ce diagnostic. Il n’y a eu ni référence, ni conseil, ni information. J’étais laissé pour compte. J’ai compris qu’il n’y avait rien à faire pour moi et que je devais simplement attendre la mort.
CP : Quel élément déclencheur vous a poussé vers l’activisme ?
Andrew T. : Au départ, j’avais trop peur que les gens découvrent mon statut. Je me focalisais exclusivement sur ma prise de traitement. J’ai vécu « caché » pendant près de huit ans. C’est seulement en 2002 que mon médecin m’a suggéré d’aider quelqu’un d’autre étant donné que mon état était stable. C’est à ce moment que j’ai commencé à apporter mon soutien aux personnes nouvellement diagnostiquées. Je suis devenu volontaire pour KLASS (Kuala Lumpur AIDS Support Services Society), qui est devenue une seconde famille pour moi. C’est un endroit où je me suis senti en sécurité. Les gens y sont bienveillants.
CP : Quand avez-vous rendu public votre statut ?
Andrew T. : Les premières fois où j’ai partagé mon histoire, j’utilisais un pseudonyme. Ce n’est qu’après le décès de ma mère que j’ai compris qu’il n’y avait plus personne à protéger de la stigmatisation. Alors, j’ai révélé mon identité. Étrangement, c’était libérateur de ne plus cacher qui j’étais.
CP : Quel message aimeriez-vous transmettre aux personnes qui découvrent aujourd’hui leur séropositivité ?
Andrew T. : Tout d'abord, je leur dirais qu'ils peuvent et vont vaincre ce minuscule virus. Avec les avancées des traitements, il est tout à fait possible de reprendre le contrôle sur sa vie et de vivre en bonne santé. Ensuite, je leur rappellerais qu'il y a beaucoup de gens qui les soutiendront chaque fois qu'ils en auront besoin. Enfin, je soulignerais qu'ils ont le pouvoir de sauver d’autres vies, tant qu'ils prennent soin d'eux-mêmes en premier. Il est important de prendre soin de soi. Lorsque j’ai célébré mes vingt ans de vie avec le VIH, j’étais au bord du burn out. Je m’étais beaucoup investi pour les autres et je m’étais un peu délaissé. Je me suis alors lancé un défi personnel : apprendre la plongée sous-marine. J’ai pris des cours et j’ai fini par obtenir mon brevet en eau libre. C’est un beau rappel que même en vivant avec le VIH, nous pouvons accomplir de grandes choses.
CP : Quelle est la recette, selon vous, pour mettre fin au VIH dans le monde ?
Andrew T. : Il faut recentrer les financements et les efforts pour faire en sorte que chaque personne diagnostiquée puisse avoir accès à un traitement de manière continue. Il est important de renforcer les systèmes de soutien afin de garantir la continuité dans la prise de traitements des personnes vivant avec le VIH. Cela ne peut se réaliser sans des programmes de soutien menés par les pairs éducateurs-rices.
CP : Que souhaitez-vous pour aujourd’hui et demain ?
Andrew T. : Mon souhait pour aujourd’hui est que tout le monde prennent conscience que le VIH n’est pas une maladie que l’on choisit de contracter. L’espoir que je porte pour demain est que toutes les personnes qui connaissent leur statut aient accès à un traitement qui leur permette de ne plus transmettre le virus.